Zistoir de l’Ouest : l’histoire de la religion Tamoule à La Réunion

Mosaïque de communautés, de cultures et de religions, l’île de La Réunion fascine par ce qu’on appelle son « vivre-ensemble ».   L’histoire de la religion Tamoule à La Réunion est intimement liée à celle de l’engagisme mis en place à l’abolition de l’esclavage sur l’île. 

Chaque mois, nous vous donnons rendez-vous pour un « Zistoir du mois »,  sous l’éclairage d’un guide de l’Office de Tourisme de l’Ouest. Clovis nous conte aujourd’hui l’histoire de la religion Tamoule à La Réunion.

Clovis et Mathieu guides dans l'Ouest de La Réunion
Crédits : Office de Tourisme de l’Ouest


O
riginaires du Sud de l’Inde, les Tamoules font aujourd’hui partie intégrante de ce métissage et de cette culture. Ces réunionnais d’ascendance indienne, qu’on appelle aussi « Les Malbars » pratiquent librement à La Réunion leur religion. Que ce soit dans la sphère privée ou au sein des nombreux temples tamoules qui ponctuent le territoire, comme à Saint-Leu ou à Saint-Paul.

L’arrivée des Malbars à La Réunion et l’origine de la religion tamoule sur l’île. 

En 1848, l’esclavage à La Réunion est aboli. À cette époque, la culture de la canne à sucre est majoritaire sur l’île et ne tient que grâce aux 65 000 esclaves qui travaillent dans l’immensité de ces champs.

Sentant ce vent de liberté qui traverse l’île, les grands propriétaires terriens comme la célèbre famille Desbassyns dans l’Ouest de La Réunion, s’inquiètent. Comment poursuivre cette culture qui nécessite une main d’œuvre importante et surtout docile ?

L’Inde est à cette période sous protectorat anglais. Une convention est signée en 1860 entre la France et l’Angleterre afin de faire venir une main d’œuvre à qui on promet monts et merveilles. Le voyage aller-retour payé, un travail, un salaire, un logement. C’est le début de l’engagisme à La Réunion.

Ainsi, les premiers groupes d’hommes et de femmes venus majoritairement du Tamil Nadu, dans l’Inde du Sud, arrivent rapidement en bateau à La Réunion, plus précisément à la Grande Chaloupe. Étant donné le nombre important d’engagés, un SAS sanitaire les attendent. Ces nouveaux arrivants sont alors examinés. Ils sont mis en quarantaine aux Lazarets avant d’être répartis chez les différents propriétaires de canne à sucre.  

Et c’est ici que réside notamment la particularité de La Réunion comme le précise Clovis de l’Office de Tourisme de l’Ouest qui connaît bien cette période de l’histoire de La Réunion. « On a intégré quasiment la même population qui était déjà sur place. En 25 ans, c’est ainsi 100 000 Indiens qui sont arrivés sur l’île. Du jamais vu dans le monde ! ». 

Le respect du culte Tamoul à La Réunion pour les engagés : pérennité et résistance des croyances hindoues.

Fetes-religieuses-tamoules

Mais les conditions de vie et la considération qu’on accorde à l’époque à ces milliers d’engagés sont équivalentes à celles des esclaves qui vont jusqu’à être hébergés dans les mêmes anciens camps d’esclaves. 

« Pour comprendre quand même la condition humaine de ces engagés tamouls, on a retrouvé des écrits qui étaient à l’époque adressés à Frédéric De Villèle, le neveu et régisseur de Mme Desbassayns à Saint-Paul. On écrivait ainsi « Venez chercher vos lots » en parlant des engagés. Comme quoi le discours et l’estime n’avaient finalement pas tellement changé… ».

En revanche, l’engagé Indien a un statut officiel contrairement aux asservis. En effet, il a droit à un vrai contrat de travail, garanti par une convention. Un salaire, des conditions d’alimentation minimum et la possibilité de faire consigner les manquements à ces obligations. Le contrat signé lui assure également le respect du culte. Et c’est cette clause de liberté de culte qui va permettre à la religion tamoule et aux cérémonies de perdurer sur l’île de La Réunion.

Une identité tamoule forte à La Réunion

« Cette pratique du culte a créé une sorte d’appartenance, une identité commune forte. » Explique Clovis. « En effet, à l’époque, la religion catholique a un énorme poids à La Réunion. Les catholiques essaient évidemment de réduire cette liberté de culte et d’inciter à la conversion… De plus, une mesure importante est prévue dans la convention des engagés à La Réunion. Tous les enfants nées à La Réunion doivent être éduqués à la pratique catholique par les propriétaires terriens. C’est ce qui explique, pour certaines générations, cette double culture spécifique à La Réunion, hindoue et catholique. » .

C’est grâce, ou à cause, de ce statut d’engagé et de cette nécessaire adaptation avec leur environnement hostile, que les Malbars à La Réunion se sont fortement accrochés à cette culture d’origine, énormément, contre tout. « Et c’est ce qui traduit une situation très paradoxale et unique à La Réunion. Les pratiques cultuelles à La Réunion, notamment autour de la religion tamoule, sont ainsi presque plus préservées et plus ancestrales que celle du pays d’origine. » . 

Une force de résistance, ancrée chez les Tamouls, qui assure la pérennité de leurs croyances et de leurs pratiques à La Réunion.

L’évolution de la religion et l’arrivée des temples tamouls à La Réunion.

Temple Tamoul RéunionDans les années 60, toutes les familles hindoues ou presque à La Réunion ont leur propre petit temple familial dédié aux nombreuses divinités de l’hindouisme mais aussi à la protection de ses ancêtres. Aujourd’hui encore, de nombreuses familles à La Réunion possèdent encore ces petits temples chez eux qu’on appelle régulièrement des chapelles. Quand arrive le début des années 80, les premiers grands temples, dédiés en majorité au Dieu Muruga, apparaissent sur l’île. 

Ces temples esthétiques et colorés sont aussi un signe de réussite pour cette communauté tamoule qui a réussi à se faire accepter sur l’île de La Réunion. Ces édifices font aujourd’hui partie intégrante du paysage de La Réunion. Ils sont, généralement, présents autour des anciennes usines à sucre comme Stella Matutina à Piton Saint-Leu. 

Au fil des années, dans certains quartiers, les tamouls de La Réunion vont faire venir des officiants directement d’Inde du sud (les Swamis) avec une fervente volonté de retrouver ce « cordon ombilical » avec leurs origines et de suivre les mêmes pratiques qu’en Inde.

 À côté de ça, une autre partie de la communauté tamoule de l’île décide, elle, de maintenir et perpétuer la pratique ancestrale de la religion hindoue à La Réunion. Ils font ainsi plutôt appel à des officiants locaux : les Poussaris. Ces deux courants et ces deux pratiques religieuses participent aussi à rendre singulière et unique la religion tamoule à La Réunion. 

Épices, cuisine et tradition du partage : l’enrichissement de la culture créole avec la culture Tamoule.

curcuma plaine des grègues tamoul reunion

La notion de partage est très forte dans la communauté tamoule et notamment à La Réunion. Après les cérémonies religieuses par exemple, les repas sont partagés, sans appartenance de religion, avec bienveillance et plaisir. 

C’est aussi une singularité de la religion tamoule sur l’île. Nul ne doute, que ce partage et cette ouverture sont aujourd’hui des parties intégrantes de la culture et de l’identité même de La Réunion.

De même, que ce soit avec l’utilisation des vannes avec les feuilles de bananes, dans le fait de manger ces grands repas partagés à la main, avec l’apparition des plats à base de Massalé ou encore dans l’importance donnée au curcuma dans la cuisine créole… ce sont autant de témoins de la culture tamoule aujourd’hui, indissociables de la culture métissée de La Réunion. 

Pour notre plus grand plaisir. 

Crédits : Office de Tourisme de l'Ouest

Ce contenu est rédigé en collaboration avec l’Office de Tourisme de l’Ouest Réunion.

Clovis et Mathieu sont les Éclaireurs de l’Ouest.

Plus que des guides, ce binôme propose chaque semaine des balades et des randonnées uniques. Des plages de La Réunion jusqu’au Cirque de Mafate, ils mêlent humour, authenticité et expertise pour notre plus grand plaisir.

Source : Office de Tourisme de l’Ouest Réunion – contenu sponsorisé