HISTOIRE DES MARRONS À LA RÉUNION ET DU CIRQUE DE MAFATE

Indéniablement liés à l’histoire de l’île, les marrons à La Réunion sont les premiers habitants des Hauts de l’île. Mafate,  Cilaos, Salazie et de nombreux lieux escarpés de l’île tirent leur nom et leur histoire des épisodes de marronnages à La Réunion.

Clovis, guide-éclaireur passionné à l’Office de Tourisme de l’Ouest, nous explique les liens qui existent entre l’histoire de l’île et celle du cirque de Mafate.

mafate

Esclavage et histoire des marrons à La Réunion

Le terme de « marron » vient de l’espagnol cimarrón. C’est un mot emprunté aux premiers habitants amérindiens d’Haïti, et qui sert à désigner un animal sauvage, plus précisément un animal domestique redevenu sauvage puis un esclave en fuite qui a retrouvé sa liberté.

Esclaves Marrons ReunionLe marronnage est le terme utilisé pour définir la fuite des esclaves, alors surnommés Marrons, dans les Antilles et à La Réunion notamment. Si le marronnage n’est pas spécifique à La Réunion, il reste l’un des fondements du métissage et du peuplement de l’île. En effet, sur l’île, appelée à l’époque Île Bourbon, les premiers marrons fuyaient alors dans les Hauts de l’île et s’établissaient, ainsi, comme les premiers habitants des hauts.

Jusqu’au début du XVIIIe siècle, les esclaves sont peu nombreux à s’enfuir. La peur des représailles est alors trop forte ; et on dénombre à peine une dizaine de marrons sur l’île. Mais rapidement, le marronnage à La Réunion s’intensifie en même temps que le peuplement de l’île. En effet, face à cette privatisation de liberté, à des conditions de vie inhumaine et la non reconnaissance en tant qu’être humain, le fameux code Noir,  l’appel de la liberté se fait de plus en plus fort et le phénomène de marronnage devient particulièrement important. 

Alors que certains marrons sont nomades et ne cessent de changer de campements, certains deviennent sédentaires et s’installent. Les marrons vivent alors en autarcie. Un peu d’agriculture, de chasse ou de pêche, ils construisent petit à petit des cases en bois. Ils font appel à leur bonne connaissance des plantes pour se nourrir et se soigner. 

Ponctuellement, ils réalisent des “Razzias” et viennent alors voler des outils, des semences, du matériel, des armes au sein des habitants isolés des bas de l’île. Des razzias parfois meurtrières. Ainsi, de véritables villages s’établissent et, les marrons malgaches, notamment, constituent même des royautés, imitant ainsi leur pays d’origine, Madagascar. On y désigne un chef, qu’on appelle roi. Les rois sont entourés de capitaines, de lieutenants… Une véritable organisation sociale est mise en place au sein des villages.

Les chasseurs de marrons à La Réunion

Chasseur-esclaves-marronsPour faire face à ce phénomène de fuite vers la liberté, des milices sont mises en place par l’État qui souhaite retrouver de l’ordre. Les propriétaires d’esclaves se mettent à proposer des récompenses à ceux qui capturent ses esclaves en fuite. Ce sont ceux qu’on va appeler les “Chasseurs de Marrons”

Ces primes représentent des revenus importants et certains chasseurs développent ainsi cette activité lucrative. Bronchard est probablement le chasseur de marrons le plus connu de l’île, tout comme Jean Dugain. Une mission exercée, en particulier, par des “petits blancs”, à savoir les descendants de colons en quête d’un statut social.

Ramenés morts ou vifs, les esclaves en fuite sont ainsi traqués partout sur l’île par ses Chasseurs de noirs, et les rescapés subiront d’atroces punitions.

Légendes et réalités des grands personnages marrons à La Réunion.

Nombreux sont les marrons devenus illustres dans l’histoire de La Réunion. Dimitile, la Reine Sarlav, Maffack,  – considéré comme le grand sorcier – à l’origine de Mafate, la légende des amoureux Anchaing et Héva, Cimendef,… Ces personnages, illustres guerriers ou dirigeants charismatiques, font partie intégrante de la culture réunionnaise. 

Pour Clovis, guide à l’office de tourisme de l’Ouest, il faut faire la part des choses.Il y a des réalités, des faits et des légendes. Aux Archives départementales, on a plusieurs récits des détachements de milices, les fameux chasseurs de noirs. Une personne faisait un rapport de milice : ce sont alors des faits historiques incontestables. En revanche, petit à petit, des légendes arrivent. L’œuvre de Eugène Dayot, Bourbon Pittoresque, paru en 1844 a joué un rôle en ce sens, je pense.”.

En effet, ce roman-feuilleton, raconte le marronnage à La Réunion et met en scène plusieurs personnages, historiques et fictifs. Un feuilleton qui retrace l’histoire fictive du partage des territoires, du Grand Roi de l’intérieur et qui reste, encore à ce jour, dans la mémoire collective. 

Le roi Phaonce au Grand Bénare à La Réunion

piton rouge roi phaonceLe plus célèbre des Roi Marrons reste probablement le Roi Phaonce. On raconte en effet que son royaume s’étendait sur toutes les hauteurs de l’Ouest, du Petit Bénare au Grand Bénare. Il fut tué par des chasseurs de Noirs, son poignet et son oreille furent ramenés à son propriétaire par ses chasseurs de primes. 

Clovis, guide à l’Office de Tourisme de l’Ouest, nous raconte. “ Le Roi Phaonce reste un personnage controversé de l’histoire de La Réunion. La tradition orale le décrit comme un chef respecté, mais aussi, comme un personnage cruel, n’hésitant pas jeter certains marrons désobéissant du haut des remparts pour asseoir son autorité.”. Passionné, Clovis a d’ailleurs arpenté plusieurs fois ce territoire, non loin du Piton Rouge, pour y découvrir toutes les grottes ayant abritées des marrons. 

Le cirque de Mafate : histoire d’hier à aujourd’hui

Le sorcier Maffack à l’origine du cirque de Mafate

Il est un marron qui reste encore peu connu dans l’histoire de l’île, et pourtant ! Maffack était un sorcier d’origine Malgache, qui possédait une excellente connaissance des plantes. Chef reconnu, il installe son territoire dans la Rivière des Galets, près d’une source thermale. 

Eugène Dayot, dans son œuvre “Bourbon Pittoresque” parle ainsi d’un “sorcier des eaux puantes” et lui confère une dimension mythique, avec des pouvoirs surnaturels, d’où le terme de sorcier.  Tombé sous les balles de Mussard en 1752, c’est de lui que le cirque de Mafate tient son nom.

Le cirque de Mafate aujourd’hui

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Ilet à Malheur à Mafate

Pour Clovis, le peuplement de Mafate, aujourd’hui, est le résultat, à la fois du Marronnage et des chasseurs de marrons. “Une fois l’abolition de l’esclavage décrétée en 1848, chasseurs et chassés se sont retrouvé sur le même espace géographique. Ils se sont mis ensemble, ils se sont mélangés. Dans les îlets de Mafate aujourd’hui, dans la cour des écoles, on voit ce métissage, entre chassés et chasseurs.” 

Les ilets ont des noms qui rappellent cette histoire.  “L’ilet à Bourse par exemple à plusieurs origines. Libre à chacun de choisir, mais on raconte que le terme viendrait tout simplement des récompenses  » les bourses” que l’on offrait aux chasseurs de marrons pour capturer les esclaves en fuite. Autre version, le terme proviendrait d’une sorte de “marchés aux marrons” installé sur place à l’époque”. Ilet à Malheur aussi, tient son nom d’un triste épisode que l’on peut consulter ici, sur le site de l’Office de Tourisme de l’Ouest. 

Régulièrement, des balades et randonnées guidées à la découverte du Cirque de Mafate et plus globalement pour en savoir plus sur l’histoire et les légendes de l’île de La Réunion sont organisées par l’Office de Tourisme. N’hésitez pas à consulter le site internet.

Clovis et Mathieu guides dans l'Ouest de La Réunion
Crédits : Office de Tourisme de l'Ouest

Clovis et Mathieu sont les Éclaireurs de l’Office de Tourisme de l’Ouest de La Réunion. Plus que des guides, ce binôme propose, chaque semaine, des balades et des randonnées uniques, des plages de La Réunion jusqu’au Cirque de Mafate mêlant humour, authenticité et expertise.