Boucan à La Réunion : un mot, un zistoir de l’Ouest !

En juin, chaque année, la station balnéaire de Saint-Gilles les Bains s’agite et accueille le Grand Boucan, LE carnaval géant de l’île de La Réunion. 

Si l’édition 2021, malheureusement, ne peut se tenir en raison du contexte sanitaire, les Éclaireurs de l’Office de Tourisme de l’Ouest ont souhaité nous partager l’histoire et la définition de ce mot bien connu des Réunionnais : le boucan. 

Grand Boucan, Boucan canot, Boucan Laleu… Voilà un mot créole qui n’est pas prêt de s’arrêter de faire du boucan ! Alors, kosa i veu dire “Boucan” finalement ? 

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Crédits : Office de Tourisme de l’Ouest Réunion

Le boucan à La Réunion : histoire et évolution d’un mot courant !

Lorsque l’on vit à La Réunion, on entend forcément ce terme de “boucan” au détour des conversations.  Boucané, boucanier, boucan… Les définitions sont nombreuses tant ce mot est inscrit dans l’usage quotidien sur l’île.

C’est Mathieu, guide éclaireur à l’Office de Tourisme de l’Ouest, qui nous explique les origines de celui-ci. “À la base, le mot “Boucan” vient des Caraïbes. Cela désignait le support où l’on mettait la viande pour la fumer. Au fil du temps et des années, le terme de “boucanier” a fait son apparition pour désigner, cette fois, les marrons de Saint-Domingue qui partaient chercher les bœufs sauvages et les zébus pour ensuite faire fumer la viande.”.Sans surprise, c’est également ce terme que l’on retrouve, par extension, dans le monde de la piraterie pour désigner les pirates ou corsaires qui vivaient de la chasse et de la contrebande.

Pour revenir à La Réunion, Mathieu nous raconte “Lorsque les premiers colons sont arrivés sur l’île, la nécessité de conserver la viande s’est également posée, comme partout ! On a ainsi vu apparaître les Farfar, cette petite cuisine avec feu de bois où l’on vient fumer la viande. Mais le boucan, ici, c’est autre chose !”. En effet, à La Réunion, le terme de “boucan” désigne une seconde petite habitation au confort très sommaire que l’on voit apparaître petit à petit en bord de mer pour les pécheurs ou dans les hauts de Saint-Paul comme à Sans-Soucis pour les planteurs de géraniums notamment. 

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Crédit : Paul Clodel

Ces petites habitations permettaient ainsi aux travailleurs de dormir sur place le temps de s’occuper des plantations ou durant la pêche. On y dort, on y mange et, petit à petit, on va également y faire fumer la viande ou les poissons.” complète Mathieu. 

Le boucan à La Réunion est fait de bric et de broc. Des tôles rouillées, des tôles de barriques, du bois, c’est tout. Sur la plage, contrairement aux boucans situés sur les hauteurs, on va plutôt utiliser des matières naturelles légères, comme du bois flotté, des feuilles de coco, des mâts de choka… Considérés comme des bidonvilles, les travailleurs qui vivent dans des boucans sont, en immense majorité, des gens pauvres. 

plage-boucan-canot-reunionAinsi, la plage de Boucan Canot tient son nom de ces petites habitations clandestines qui, à l’époque, fleurissaient en bord de plage.

Le canot étant le nom créole donné aux petites barques de pêcheurs que l’on peut encore observer dans certains petits ports de l’île, ça a donné le nom de Boucan Canot.

Tout simplement !

Les Boucans clandestins des hauts de Saint-Paul et de Saint-Leu 

Dans les années 1900, la culture du géranium rosat est particulièrement florissante dans les hauts des villes comme Saint-Paul et Saint-Leu. 

La forêt de Sans-Soucis ou encore l’ilet Alcipe (et non Alcide, le nom qui est écrit par déformation sur les panneaux de la célèbre randonnée de l’ouest de l’île!) à Bois de Nèfles Saint-Paul sont, à cette époque, des lieux privilégiés de la culture de cette plante. Damour, Wilman, Grégoire… Ils sont nombreux à venir installer des boucans dans les hauteurs de l’Ouest.  En effet, qu’on ne s’y trompe pas, les boucans de La Réunion permettent aussi, aux cultivateurs de l’époque d’empocher la totalité des recettes sans être taxés. Si aujourd’hui l’immense majorité des boucans ont disparu, vous pourrez tout de même en voir quelques ruines dans les hauts de Saint-Paul ainsi qu’au Piton Fougère par exemple.

De Boucan Laleu à Saint-Leu : la création de la ville de l’Ouest de La Réunion

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Plage de Saint-Leu

La ville de Saint-Leu tient son nom d’un certain Sieur Laleu, premier habitant de la ville. Durant des décennies, cet endroit s’est aussi fait appeler « Boucan Laleu » puisque celui-ci y avait construit un boucan, tout simplement !  Mais le terme de “boucan” est péjoratif. On pense même à un coupe-gorge ! Au cours du XVIIIème siècle, la Compagnie des Indes décide alors de remplacer le nom de “Boucan Laleu” en “Repos Laleu”.  Bien plus acceptable !” explique Clovis, lui aussi guide-éclaireur de l’Office de Tourisme.  En 1776, le territoire devient paroisse sous le nom de Saint-Leu et c’est uniquement en 1790 qu’elle sera classée définitivement comme commune sous le nom de Saint-Leu. Découvrez l’histoire de Saint-Leu sur le site de l’Office de Tourisme de l’Ouest.

Et le Grand Boucan de La Réunion dans tout ça ?

grand boucan 2020 annulation coronavirusQu’on ne s’y trompe pas : le Grand Boucan de Saint-Gilles les Bains n’a strictement rien à voir avec le terme créole de boucan ! L’histoire du Grand Boucan est tout simplement née, il y a bientôt 25 ans, dans l’esprit d’Anne Savet, la présidente de la Compagnie Pôle Sud et créatrice de l’événement. Au début, tout se passe dans le jardin familial et petit à petit, au fil des années et des rencontres, le carnaval s’ouvre à la rue et rencontre son succès. 

Ainsi, ici, le terme de Boucan s’entend plutôt dans le sens du bruit, du bordel. En effet, chaque année en juin, l’Ouest de La Réunion accueille ce carnaval de plus en plus populaire organisé par la Compagnie Pôle Sud en partenariat avec les associations de commerçants et les partenaires publics comme la ville de Saint-Paul et l’Office de Tourisme de l’Ouest de La Réunion. 

Aujourd’hui, le Grand Boucan est, sans contexte, LE plus grand carnaval de l’île et plusieurs milliers de Réunionnais se pressent chaque année pour observer le défilé, acclamer le Roi Dodo et faire la fête ! Tradition oblige, le Roi Dodo est aussi brûlé sur la plage des Roches Noires ou des Brisants. Découvrez en plus sur ce festival haut en couleurs ! 

Cher Roi Dodo, le rendez-vous est pris pour l’année prochaine ! 

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Crédit : Office de tourisme de l'Ouest
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Crédits : Office de tourisme de l'Ouest

Cet article est rédigé dans le cadre de soutien apporté par l’Office de Tourisme de l’Ouest à l’organisation du Grand Boucan, chaque année en juin. 

Clovis et Mathieu sont les Éclaireurs de l’Office de Tourisme de l’Ouest de La Réunion. Plus que des guides, ce binôme propose, chaque semaine, des balades et des randonnées uniques, des plages de La Réunion jusqu’au Cirque de Mafate mêlant humour, authenticité et expertise.

Clovis et Mathieu guides dans l'Ouest de La Réunion
Crédits : Office de Tourisme de l'Ouest